Les pratiques concrètes des viticulteurs bretons pour encourager la biodiversité
1. Les haies champêtres : corridors de vie et refuges à faune
En Bretagne, l’héritage bocager n’est pas une légende. Les viticulteurs bio intègrent souvent la plantation ou la restauration de haies autour des parcelles. Au-delà de la simple délimitation, ces haies servent à :
- Abriter une multitude d’oiseaux insectivores, auxiliaires naturels dans la lutte contre les ravageurs de la vigne.
- Offrir un habitat aux reptiles, amphibiens ou petits mammifères utiles au sol.
- Contribuer à la régulation hydrique et à la protection contre le vent salin.
On note, par exemple, que sur le domaine de Rhuys en Morbihan, ce sont plus de 350 mètres de haies diversifiées qui ont été plantés en 2022, associant aubépines, noisetiers, prunelliers et chèvrefeuilles (Bretagne Presse).
2. Enherbement : laisser pousser la vie entre les rangs
L’époque du sol nu systématique entre les ceps est bel et bien révolue sur bon nombre de domaines bretons. L’enherbement maîtrisé des inter-rangs — qu’il soit naturel (flore locale spontanée) ou semé (mélange de graminées et légumineuses) — offre plusieurs bénéfices :
- Alimentation de la vie du sol : Les micro-organismes trouvent abri et nourriture, stimulant la structure et la fertilité du sol.
- Accueil des pollinisateurs : Nombre d’espèces de fleurs attirent abeilles, syrphes ou papillons, essentiels à l’équilibre écologique.
- Amélioration de la régulation thermique et hydrique : L’herbe limite l’évaporation et tamponne les excès d’eau (un atout avec les épisodes de pluie bretons).
Certains vignerons sélectionnent jusqu’à 8 ou 10 espèces différentes dans leurs mélanges pour maximiser l’accueil de la biodiversité : trèfles, sainfoins, fétuques, luzernes, phacélies… Ces prairies miniatures s’observent de Carnac à Brocéliande.
3. Nichoirs, hôtels à insectes et abris pour la faune : l’hospitalité avant tout
Différents ouvrages semi-naturels sont volontairement installés pour attirer des auxiliaires :
- Nichoirs à chauves-souris : Ces insectivores nocturnes peuvent dévorer jusqu’à 3000 petits insectes par nuit, participant à la régulation biologique des vers de la grappe (source : Muséum National d’Histoire Naturelle).
- Hôtels à insectes : Refuges pour coccinelles, osmies, chrysopes et autres prédateurs naturels d’acariens et pucerons.
- Monticules de pierres : Cachettes appréciées des lézards et orvets, autres alliés du vigneron bio.
Le domaine Les Longues Vignes, dans le Finistère, a répertorié une hausse de 40% du nombre de nids occupés par des passereaux depuis l’installation de ces nichoirs en 2019.
4. Bandes fleuries et couverts végétaux : festin pour les pollinisateurs
Les bandes fleuries, souvent semées à proximité des vignes, servent de “restaurant permanent” aux insectes butineurs et pollinisateurs, dont certains sont menacés au plan national (le déclin des abeilles a atteint 30% dans certaines zones françaises selon l’INRAE).
- Lavande, lotier, bourrache, vipérine : Autant de plantes rustiques qui colorent et parfument les abords des vignes, tout en accueillant pollinisateurs et prédateurs d’insectes nuisibles.
Sur l’ensemble des exploitations bio suivies par la Chambre d’Agriculture de Bretagne en 2023, près de 80% déclaraient avoir recours à au moins une bande fleurie de plus de 100 m² (Bio Bretagne).
5. Gestion douce du sol et absence de pesticides de synthèse : un microcosme préservé
Le bio, ce n’est pas que refuser les produits chimiques… c’est également choisir des itinéraires de travail du sol respectueux. Certains domaines n’hésitent pas à réduire la mécanisation, à pratiquer le paillage ou remettre en vigueur la traction animale pour que la microfaune du sol prospère.
- La vie microbienne est alors 30% plus abondante dans ces sols (source : étude Agreste Bretagne – 2023).
Des analyses menées à Saint-Suliac ont montré que, dans les vignes en agriculture biologique depuis plus de cinq ans, on comptait en moyenne :
- 12 espèces différentes de vers de terre (contre 3 à 4 en conventionnel sur les mêmes terroirs à proximité)
- Une biomasse racinaire doublée