La Bretagne bio en action : focus sur les projets moteurs d’une région engagée

25/06/2025

Une Bretagne pionnière : l’essor impressionnant du bio local

La Bretagne ne se contente pas d’être la première région agricole française en surface utile (DRAAF Bretagne). C’est aussi un terrain d’expérimentation fertile pour l’agriculture biologique. En 2022, 16% des fermes bretonnes étaient engagées en bio (source : Agence Bio), un record pour une région au climat réputé difficile pour la viticulture et certaines cultures. Mais cet engouement s’éclaire surtout à la lumière de projets innovants en réseaux, à échelle humaine ou territoriale.

Les filières bio structurantes : quand collectifs et territoires s’unissent

Le Collectif des Laiteries Bio de Bretagne : du lait à la dynamisation rurale

Impossible d’évoquer le bio breton sans parler du secteur laitier, fer de lance de la région. Dès 2016, un collectif d’éleveurs et laiteries a lancé la marque “Bio Breizh” pour garantir la traçabilité du lait bio local dans une filière souvent mondialisée. Aujourd’hui, ce collectif mobilise plus de 500 producteurs et valorise près de 100 millions de litres de lait par an en bio, via des coopératives telles que Laiterie de Kerguillet ou La Laiterie Le Gall (Laiterie Le Gall). Les producteurs ne se mobilisent pas uniquement pour la qualité du lait : ils soutiennent aussi la biodiversité, les prairies pâturées et travaillent main dans la main avec les acteurs locaux sur tout le territoire. Le lait, ici, irrigue une dynamique sociale aussi forte qu’environnementale.

Légumes et circuits courts : la coopérative Bio Breizh

Côté végétal, la coopérative Bio Breizh (à ne pas confondre avec la marque laitière !), fédère 70 maraîchers pour produire plus de 20 000 tonnes de légumes bio chaque année. Ici, tout est pensé pour garantir la souveraineté alimentaire locale et la juste rémunération des producteurs. Cette dynamique s’accompagne de projets d’innovation, à l’image du renouveau des cultures oubliées comme le rutabaga, l’artichaut ou les variétés anciennes de pommes de terre bretonnes, adaptées au terroir et au climat.

Réinventer la tradition : le renouveau des boissons bretonnes bio

Des vignobles bretons qui osent le bio, entre tradition et innovation

Longtemps, la Bretagne est restée absente de la carte des vins français. Or, depuis les années 2000, des vignerons passionnés replantent la vigne – et pas n’importe laquelle ! Aujourd’hui, sur près de 115 hectares recensés (source : Route des Vins de Bretagne), environ 40% des surfaces sont conduites ou converties en agriculture biologique ou en biodynamie.

  • Domaine du Haut Planty (Loire-Atlantique/Bretagne historique) : essentiel dans la relance du Muscadet bio.
  • Vignoble de la Freslonnière à Rennes : premier officiellement certifié AB sur sol breton.
  • Domaine Les Longues Vignes (Finistère) : pionnier de la viticulture biodynamique sur granit.

Le renouvellement ne s’arrête pas à la surface plantée : il s’étend au choix des cépages adaptés, parfois oubliés, et à la création de chais ouverts à la pédagogie et à l’agrotourisme. Ces projets mettent l’accent sur les levures indigènes, la vinification naturelle, une palette aromatique surprenante de fraîcheur iodée… Une vraie signature bretonne !

Le cidre bio breton : valorisation des variétés locales et circuits courts

Si le cidre est indissociable de la Bretagne, la filière bio n’y est pas en reste. Le Symbole Produit en Bretagne a boosté l’offre : aujourd’hui, près de 30% des vergers se reconvertissent en bio, notamment dans le Finistère et les Côtes-d’Armor (France Cidre). Les cidreries artisanales relancent le patrimoine variétal oublié, telles que la pomme Douce Moën ou la Guillevic.

  • La Cidrerie Kerisac à Guenrouët, pivote vers le bio à grande échelle depuis 2018.
  • La ferme de Kermabo propose des crus mono-variétaux bio, véritable ode aux terroirs granitiques finistériens.

La démarche va au-delà du produit : certains cidriers se mobilisent pour préserver les haies, favoriser la pollinisation et dynamiser l’économie locale avec des points de vente à la ferme ou sur les marchés.

L’innovation au service du vivant : projets d’agroforesterie, économie circulaire et biodiversité

Agroforesterie et haies bocagères : projets pilotes bretons

Ce sont presque devenus le symbole du renouveau rural breton : les haies et l’agroforesterie investissent les parcelles bio. Depuis 2018, l’initiative régionale “Plantons des haies” a permis de replanter 600 kilomètres de haies, souvent sur des exploitations en conversion bio. L’association Bocage Avenir forme, accompagne, finance les producteurs pour le maintien d’un paysage bocager mosaïque – indispensable au maintien de la faune, à la lutte contre l’érosion et à la qualité de l’eau.

  • La ferme du Yverno (Morbihan) a créé 5 km de haies fruitières bio, source de revenus complémentaires et d’abris pour la biodiversité.
  • Des plateformes mutualisées collectent le broyat de bois pour le composter sur place ou en litière animale.

Vers le “zéro déchets” dans la filière bio bretonne

Sur le plan environnemental, la Bretagne bio multiplie les exemples vertueux :

  • Laiteries et fromageries de la région réutilisent le petit-lait pour l’alimentation animale ou la méthanisation.
  • Plusieurs domaines cidricoles élaborent des vinaigres, des gelées et des spiritueux à partir des sous-produits de la pomme.
  • Collecte des emballages agricoles et transition vers des packagings compostables, à l’initiative de la SCIC Breizh Pack (Lorient).

Des fermes pédagogiques et des tiers-lieux pour transmettre et innover

La dynamique bretonne du bio ne serait pas la même sans la floraison d’espaces d’expérimentation et d’éveil des papilles. Près de 180 fermes pédagogiques bio ouvrent chaque année leurs portes au public, soit près de deux fois plus qu’en 2010 (source : Afac-Agroforesteries Bretagne).

  • Les Jardins Partagés de Redon, pionniers de l’agroécologie participative, mêlent ateliers cuisine, dégustation de vins naturels, cueillettes partagées et pédagogie paysanne.
  • La Manufacture du Vivant à Saint-Malo, tiers-lieu dédié aux transitions agricoles, invite à la découverte des pratiques bio et de la biodiversité locale.
  • L’initiative “Breizh Wine Tour” fédère une douzaine de vignerons et vigneronnes pour des parcours de découverte autour du vin bio, du paysage au chai.

L’objectif ? Ouvrir le dialogue entre monde rural et citadins, transmettre les valeurs du goût et éveiller aux enjeux de la terre nourricière.

La force du collectif : réseaux de producteurs, AMAP et structuration professionnelle

La Bretagne bio rayonne par la force de ses synergies. Les AMAP (Associations pour le Maintien d’une Agriculture Paysanne), dont la densité est l’une des plus élevées de France, structurent la vente directe et assurent un débouché équitable pour les petites fermes.

  • Plus de 440 AMAP recensées en 2023 (AMAP Bretagne), auxquelles s’ajoutent des magasins de producteurs mutualisés sur tout le territoire.
  • L’initiative collective Terres de Sources (Rennes Métropole), née pour préserver la ressource en eau, associe producteurs bio, collectivités et restaurateurs dans une véritable boucle vertueuse.
  • Des plateformes numériques comme “Clic Ta Berouette” facilitent la localisation et la vente directe de produits bio bretons, repoussant les frontières du circuit court.

Une transition agricole et alimentaire en mouvement

La Bretagne bio ne se contente pas de répondre à la demande : elle invente, fédère, et inspire. Ports, villages et terres à l’abri des talus voient fleurir des initiatives complémentaires, portées par l’énergie locale et la conviction que le goût, la biodiversité et la qualité peuvent se conjuguer au présent et au futur.

Qu’il s’agisse de cidriers engagés dans le label AB, de vignerons pionniers, de collectifs laitiers ou de maraîchers innovants, la dynamique est tangible, incarnée dans les paysages et dans l’assiette. Un vent d’audace souffle sur la région, qui n’a pas fini de surprendre les curieux comme les gourmands. À chaque projet, une histoire de saveurs et de terroirs réinventés : la Bretagne bio, ce sont mille et une façons de cultiver le futur – les bottes dans la rosée, la tête dans les embruns.

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